Les anciennes versions de la Bible (vocabulaire)

Dans cet article , je présenterai brièvement les anciennes versions et traductions de la Bible, en montrant avec quelques exemples, leur intérêt pour la compréhension du Nouveau Testament et leur utilité dans l’étude de l’histoire de la Bible. Avant de commencer, je conseille la lecture de mon article précédent (Qumran et les manuscrits de la mer Morte) où j’explique notamment ce qu’est le Texte Massorétique (TM) quej’évoquerai régulièrement ici (et ultérieurement dans d’autres articles).

 Septante (LXX)

La Septante, que nous désignerons souvent sous le sigle « LXX » (qui veut dire 70 en chiffres romains) est la plus ancienne traduction de la Bible. A l’origine elle ne désigne que le Pentateuque (les 5 premiers livres de la Bible) et tire son nom d’un récit qui rapporte que la traduction aurait été effectuée par 70 traducteurs. Cependant par extension, c’est l’ensemble de la première Bible grecque qui a été désignée sous ce nom. Les 5 premiers livres ont été traduits au III ème siècle avant Jésus-Christ, et les autres livres ont été progressivement traduits au II ème et Ier siècle avant Jésus-Christ. A l’époque de Jésus tout l’Ancien Testament est donc déjà traduit en grec, à l’exception peut-être d’un ou deux livres (Ecclésiaste). Cette Bible a connu certaines révisions. On  distingue toutefois ces révisions des nouvelles traductions effectuées par des Juifs après la venue de Jésus (Aquila, Théodotion).

Nous avons déjà au l’occasion d’’étudier les particularités de la Septante. Les différences avec le TM sont essentiellement des données factuelles (voir notre vidéo : Les auteurs du Nouveau Testament et la Septante), mais parfois il y a aussi des variantes dans le sens. Outre l’exemple que nous avons présenté (Amos 9 ou la conversion des nations), nous pouvons aussi illustrer cela avec quelques versets de Job :

Job  5, 11

« Il relève les humbles, Et délivre les affligés » (Version TM)

« qui exalte les humbles et ressuscite les morts » (Version LXX)

Job 14, 14 :

« Si l’homme une fois mort pouvait revivre, J’aurais de l’espoir tout le temps de mes souffrances, Jusqu’à ce que mon état vînt à changer. » (Version TM)

« Car si un homme meurt, il vivra, ayant accompli les jours de sa vie. J’attendrai jusqu’à ce que je vive de nouveau ».  (Version LXX)

Job 19, 25-26

« Mais je sais que mon rédempteur est vivant, Et qu’il se lèvera le dernier sur la terre.  Quand ma peau sera détruite, il se lèvera; Quand je n’aurai plus de chair, je verrai Dieu. » (Version TM)

« Car je sais qu’il est éternel celui qui va me délivrer ; sur la terre que ressuscite ma peau qui supporte tout cela ; car pour le Seigneur ces choses sont accomplies pour moi ». (Version LXX)

Job 42, 17

« Et Job mourut âgé et rassasié de jours. » (Version TM)

« Et Job mourut vieux et rempli de jours. Il est écrit qu’il ressuscitera de nouveau avec ceux que le Seigneur ressuscite » (Version LXX)

Nous voyons ici que la Septante propose une perspective théologique de la résurrection absente du Texte Massorétique.

Targum

La deuxième version est le Targum. C’est une traduction araméenne de la Bible. Ce terme singulier cache une pluralité de textes, puisqu’on distingue en général deux grands Targum. Le premier paraphrase le texte hébreu d’assez près, tandis que le deuxième contient de nombreux rajouts dus à la tradition orale.  Nous avons déjà eu l’occasion d’en parler dans notre article La Bible et le Targum, en évoquant le cas de Jannès et Jambrès mentionnés par Paul.

Le Pentateuque Samaritain (PS)

A l’avenir je l’abrégerai régulièrement PS, merci donc de ne pas lire « Parti Socialiste », dans un blog qui ne parle pas de politique.

Comme son nom l’indique, il s’agit de la Bible utilisée par les Samaritains, les « frères ennemis » des Judéens, puisque ces deux peuples, qui sont très proches géographiquement et religieusement, se détestent (Jean 4 : 9). Comme les Sadducéens, les Samaritains ne reconnaissent comme autorité scripturaire que les 5 premiers livres, la Torah de Moise : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome.

Dans le Nouveau Testament, nous trouvons au moins une trace du PS, dans le discours d’Etienne lorsqu’il évoque la mort de Térach (Actes 7 : 4). Chronologiquement cela ne coïncide pas avec le Texte Massorétique puisqu’il y a 60 ans d’écart entre le départ d’Abraham et la mort de son père (Genèse 11). En revanche cela correspond au PS où Térach meurt 60 ans plus tôt. Cette utilisation du PS est par ailleurs confirmée par le nombre de personnes mentionnées pour la montée en Egypte : 75 (Actes 7 : 14), chiffre qui est donné par le PS, tandis que le TM a 70 (Genèse 46 : 27 TM).

Vetus Latina

Ce terme de Vetus Latina est là encore un terme générique pour désigner l’ensemble des versions latines qui précèdent la traduction de Jérôme. Le texte de l’Ancien Testament est celui de la Septante. Ces traductions sont cependant intéressantes car elles nous présentent parfois un texte plus ancien que les manuscrits grecs conservés. Là encore cela est utile pour nous éclairer sur certains passages. Si nous lisons le texte d’Hébreux 9 : 3-4, nous voyons que l’auteur situe l’autel des parfums dans le saint des saints, alors que dans le texte d’Exode, il est à l’extérieur.

« Derrière le second voile se trouvait la partie du tabernacle appelée le saint des saints, renfermant l’autel d’or pour les parfums, et l’arche de l’alliance, entièrement recouverte d’or. Il y avait dans l’arche un vase d’or contenant la manne, la verge d’Aaron, qui avait fleuri, et les tables de l’alliance » Hébreux 9 : 3-4

« Tu placeras l’autel en face du voile qui est devant l’arche du témoignage, en face du propitiatoire qui est sur le témoignage, et où je me rencontrerai avec toi.   Aaron y fera brûler du parfum odoriférant; il en fera brûler chaque matin, lorsqu’il préparera les lampes;   il en fera brûler aussi entre les deux soirs, lorsqu’il arrangera les lampes. C’est ainsi que l’on brûlera à perpétuité du parfum devant l’Eternel parmi vos descendants. » Exode 30 : 6-8

En réalité cela s’explique tout simplement par le fait que l’auteur de l’épitre lisait un texte différent de celui que nous avons actuellement dans nos bibles. C’était une ancienne version de la Septante, attestée notamment par un manuscrit de la Vetus Latina (le monacensis)(1), dans laquelle l’autel des parfums était effectivement situé dans le saint des saints. Là encore cette solution est confirmée par les autres citations de l’épitre aux Hébreux, qui suivent aussi cette version.

Nous aurons l’occasion de retrouver ces versions dans de prochains articles.

Bibliographie

(1) Une étude détaillée de la question est proposée par Pierre-Maurice Bogaert dans son article « La construction de la Tente (Ex 36-40) dans le Monacensis de la plus ancienne version : l’autel d’or et Hébreux 9 : 4 » in SCHENKER L’enfance de la Bible hébraique, Genève, Labor et Fides, 2005

2 réflexions sur “Les anciennes versions de la Bible (vocabulaire)

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